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Alfredo Maria Santoro,

Hommages en mémoire d’Andreas Kiesewetter

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Andreas Kiesewetter : un souvenir

1Dans l'après-midi du 20 octobre 2021, Andreas Kiesewetter est décédé à son domicile en Afrique du Sud. Il avait 59 ans.

2Je l'ai connu lors d'un colloque organisé par Serena Morelli à Naples. On s'est tout de suite plu. C'est lui qui s'est approché de moi, intrigué par mon intervention. Allemand au caractère extraverti et aux traits exubérants, il avait un grand sens de l'humour qui m'a immédiatement frappé. Il avait étudié à l'Université de Würzburg où il a eu pour professeur Peter Herde. Il a ensuite obtenu une bourse d'études à l'Istituto di Studi Storici di Napoli, avant de s'installer à Rome en tant que boursier de l'Istituto Storico Germanico. Lorsqu'il se laissait emporter par les histoires de vie, une cigarette entre les doigts, son être d'habitant du monde apparaissait, suspendu surtout entre l'Afrique et l'Europe : imposant et avec un fort accent allemand, il s'exprimait très bien dans plusieurs langues dont le français et l'italien. C’est un chercheur qui s’est particulièrement investi dans l'étude de l'histoire de Tarente et des Pouilles, de l'époque normande à l'époque des Orsini.

3Il a livré des dizaines de travaux qui partagent tous la nouveauté dense des acquisitions historiographiques, acquises grâce à une connaissance impressionnante des fonds d'archives européens publics et privés qu'il a repérés et explorés avec obstination. Les principales caractéristiques de ses écrits sont le rejet documenté des stéréotypes et l'approche historique détaillée et critique.

4Dans le sillage de la meilleure historiographie allemande, il avait une connaissance approfondie et systématique de la tradition des études sur les questions qu'il a traitées au fil des ans (de Bohémond d'Hauteville au roi Charles II d'Anjou, à la principauté de Tarente), questions qu'il a abordées avec une attitude critique toujours lucide, également nourrie par la découverte de documents inédits.

5Son point de vue était toujours intéressant, parfois original, pas très académique et risquant d'être « brutal » à mes yeux. Pas de respect des traditions, pas de soumission aux pensées dominantes : seulement et toujours ses connaissances et son raisonnement, avec pour résultat qu'il a ouvert de nouveaux scénarios pour la recherche historique. En cela, il a toujours été rigoureusement cohérent non seulement dans sa méthode scientifique mais aussi dans sa posture de chercheur. Esprit libre irrévérencieux et, si nécessaire, désacralisant, impitoyable mais bienveillant et intellectuellement honnête, il a accumulé des mérites historiographiques qui auraient pu lui valoir une carrière institutionnelle dans le monde de la recherche. Le fait qu'il soit complètement hors des paramètres académiques ordinaires a fait qu'il n'a obtenu que des affectations temporaires et, en définitive, l'a consacré à la dimension qui lui convenait : l'étude et la recherche historique, exercées quotidiennement sans contraintes, sans liens institutionnels, sans révérence, sans bureaucratie et sans formalités. Je me demande s'il aurait pu produire et avoir un tel impact autrement ; et je m'interroge aussi pour l'ensemble de la communauté scientifique-académique, qui est de plus en plus accablée et submergée par le travail administratif. Andreas était lié à la communauté des universitaires italiens, en particulier des Pouilles (ses visites à Tarente étaient innombrables : plusieurs fois par an pendant des décennies) et de Naples, qu'il visitait souvent lors de ses voyages d'étude. Sa disparition laisse aujourd'hui un vide chez les nombreux amis qui, dispersés dans le monde, l'estimaient et l'aimaient, tandis que la valeur novatrice et originale de sa production historiographique reste évidente.

6En tant que chercheur sur l'Italie méridionale médiévale, je me souviens de son intérêt pour la géo-histoire et la topographie (non seulement des Pouilles, mais aussi des territoires de la Grèce et de l'Albanie actuelles), pour certaines grandes familles comme les Orsini del Balzo, pour la principauté de Tarente et pour les fonctionnaires angevins d'origine apulienne. En tant qu'archéologue, je tiens également à souligner les excellents essais sur le château de Tarente.

Bibliographie go_to_top

Certains de ses travaux peuvent être téléchargés sur Academia.edu :

https://independent.academia.edu/AndreasKiesewetter

Pour les titres de ses études, voir Regesta Imperii :

http://opac.regesta-imperii.de/lang_de/autoren.php?name=Kiesewetter%2C+Andreas

Quelques titres ont particulièrement retenu notre attention :



go_to_top L'auteur

Alfredo Maria  Santoro

Università degli Studi di Salerno/Universitè d'Angers – Temos.

Pour citer cet article go_to_top

Alfredo Maria Santoro, « Hommages en mémoire d’Andreas Kiesewetter », Mémoire des princes angevins 2021, 14  | mis en ligne le 31/12/2021  | consulté le 25/04/2024  | URL : https://mpa.univ-st-etienne.fr:443/index.php?id=553.